La nausée... ou quand l'Iran revisite l'Histoire...

Je suis issue d'un peuple d'affabulateurs. J'ai moi-même perpétué la tradition du mensonge... J'en ai fait la trame de ma vie, d'une partie de mes livres, de mes prises de paroles. J'ai sans vergogne abusé des enseignants pour m'introduire auprès de leurs élèves et  leur distiller mon venin, celui qui m'avait été transmis et dont je n'avais pas arrêté la chaîne. Heureusement des personnages sérieux, pour la plupart historiens, donc documentés, forcément documentés,  partout dans le monde, tentent depuis plus de 60 ans de rétablir la vérité que mon peuple et moi avons falsifiée. Comment osons-nous soutenir que des millions des notres ont été exterminés, gazés pour la plupart, dans des camps de concentration? Alors qu'un éminent révisionniste de l'Histoire, Louis Darquier de Pellepoix , affirme qu' à Auschwitz, on n'a gazé que des poux et que le génocide est une invention juive. Invention que ces machines de mort mises en place par le système Nazi? Que cette cohorte de femmes, d'enfants, de vieillards devenus cendre et poussière en quelques instants? Invention que ces bébés fracassés contre des murs par des officiers SS sans état d'âme, trouvant plus d'humanité à leurs chiens qu' à ces enfants issus d'une race "impure".

Je suis en colère. Une colère mêlée d'une immense tristesse. Faudra -t'il toujours se justifier de la Shoah ? Les millions de morts, pour la plupart juifs, mais pas seulement, faut-il le rappeler, tziganes, homosexuels, franc-maçons, handicapés, victimes d'une barbarie qui n'avait pas même un visage humain vont-ils devoir éternellement être niés dans leur dignité? Comment est-il possible aujourd'hui qu'en Iran se réunisse la fine fleur des négationnistes sans qu'on ne puisse faire contre poids contre ces "chiffonniers de l'Histoire"? J'ai eu à ferrer contre certains d'entre eux. Je sais la puissance de leur verbe nauséabond. J'ai d'ailleurs reçu un jour chez moi un envoi "éducatif", censé me donner une leçon d'histoire. Ces écrits de Robert Faurisson exhalent tous la même immonde pensée. Ce  professeur de littérature à l'Université de Lyon a focalisé toute son action contre la dénonciation publique de ce qu'il appelle "l'imposture du vingtième siècle", en clair la réalité du génocide et des chambres à gaz. Ce même Robert Faurisson était l'un des membres actifs de cette conférence de Téhéran. Même si cette conférence a soulevé des critiques partout dans le monde, même si je salue l'initiative du Président de la République, Jacques Chirac, de faire diligenter une enquète préliminaire concernant les propos tenus par R Faurisson, je ne peux m'empêcher d'être violemment percutée par la réalité de la tenue de cette conférence.

 Combien de fois me suis-je répétée que je devais vivre ma propre vie, que je devais aborder l'autre côté de la Shoah, qu' il fallait regarder en avant, s'ouvrir à demain et à ses promesses? Je ne puis cependant cesser d'avoir ce lien indéfectible avec les miens, tous les miens. Je suis issue du Peuple du Livre, j'en porte la mémoire originelle. Je suis aussi maillon de l'Humanité, attachée  viscéralement aux idéaux de noblesse, de fraternité entre tous les peuples que ces négationnistes bafouent depuis trop longtemps.