Genèse d'un roman... en approche vive.
Il y a quelques années, j’eus le privilège de rencontrer Raghunath Manet, le danseur, adulé en Inde, une star. Terme qu’aurait abhorré son maître, Ram Gopal, dont il est le fils spirituel et duquel il reçut les enseignements du Bharata-Nâtyam.
Ram Gopal… et je compris soudain que, décidément non, le hasard n’était pas convié ce jour-là. Laissant momentanément mon travail de journaliste de côté, je me lançais alors dans une mission d’attachée de presse pour une compagnie de théâtre. C’est ainsi que je rencontrais un réalisateur, Denis Lazerme, avec lequel je nouais des liens d’amitié. Il venait de terminer un film sur et avec Ram Gopal et projetait de partir à Bangalore, avec moi, si je le souhaitais, pour rencontrer de nouveau le maître, déjà très âgé.
Ce documentaire, flamboyant, « Rien qu’un Soleil », je l’intégrais au plus profond de mon être. C’était l’Inde, déjà, Pondichéry, la danse indienne, le kathakali, entre autres, qui, peu à peu, habitèrent un espace protégé de ma mémoire.
Nous ne pûmes aller à Bangalore, à la rencontre de Ram Gopal, malade, épuisé même, mais je garde encore le souvenir de la conversation téléphonique que j’eus avec lui, du souffle mystérieux de sa voix, dont je ne puis aujourd’hui m’empêcher de penser qu’il fut inconsciemment à l’origine du roman que j’achevais récemment. Qui se passe en Inde, à Pondichéry, entre autres, et qui raconte l’histoire de deux danseurs de kathakali. Qui, comme Raghunath Manet, voulurent moderniser cette danse, provoquant dans mon roman la colère des dieux.
J’attendis que Raghunath descende de scène pour saluer son public. Puis nous eûmes un bel échange, évoquant, entre autres, son maître, qu’il rencontra à Londres, presque à la fin de sa vie. Il était à ses côtés, aux derniers instants, à Bangalore, pour l’accompagner de « l’autre côté du miroir ». Et Ram Gopal est désormais présent spirituellement à chaque acte sacré de sa vie. La danse en est un.
Lorsque je quittais ce jour-là Raghunath Manet, j’entendis de nouveau intérieurement la voix de Ram Gopal.
Je comprends depuis que ce roman, dont je termine une ultime version, en croyant qu’il était pur produit de mon imaginaire, porte en filigrane la résonance de cette voix.
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